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LÉGENDES GASPÉSIENNES.

ornées de leurs plus beaux atours, penchaient leur tête réjouie sur l’épaule de leur compagnon. Julien, au bras de sa femme, se sentait envahi d’une joie à nulle autre pareille. Non, jamais la vie n’avait été si bonne, jamais il n’aurait cru à un tel bonheur. Et son regard ardent ne pouvait se détacher de celle dont le sourire le rendait fou et brûlait le sang de ses veines.

Mais, tout-à-coup, une grande noirceur se fit dans la salle. L’obscurité devint si profonde que nul n’osait bouger. Une ombre blanche, un fantôme presque imperceptible, glissa sans bruit comme les êtres que l’on voit en songe, et pénétra dans la foule. Cette ombre s’approcha de Julien, l’enveloppa d’un immense linceul, puis franchissant le seuil de la porte, l’emporta à travers les champs… Il entendait la voix de Geneviève qui criait tristement : « Julien ! Julien ! » Rien ne pouvait l’arrêter dans sa course ; il disparut dans la nuit. Cette ombre l’entraîna follement par-dessus les montagnes, à travers les plaines et le long des grèves. C’est en vain que l’épouse désespérée