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LÉGENDES GASPÉSIENNES.

battait très fort sous sa grosse blouse de toile bleue… La Louise rougit. Ses yeux étincelèrent comme le flot qui bat les falaises de Gaspé. Et de sa voix mélodieuse, de cette voix divine qui l’avait toujours remué jusqu’au plus profond de l’âme, elle répondit doucement :

— Je dis pas non, Monsieur Ivon. Vous savez, y en a pas d’autre comme vous, y en a pas d’autre »… Et d’un geste spontané, elle lui tendit sa main qu’il garda longtemps dans la sienne.

Il partit le lendemain pour les chantiers. Il fut envoyé avec un grand nombre d’autres dans une forêt du lac Saint-Jean où le bois était si épais qu’on ne voyait rien à travers.

Le froid était grand et l’ouvrage était dur. De bonne heure la neige se mit à tomber. Elle tomba durant plusieurs jours et à plusieurs reprises. La forêt fut comme ensevelie sous la neige. La cabane où les hommes se retiraient n’avait plus de forme, et son toit en pignon semblait perdu dans la froide blancheur où tout disparaissait. Ivon fut pris de dégoût pour cette forêt