Page:Lamontagne-Beauregard - Légendes gaspésiennes, 1927.djvu/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
IVON LEFRANÇOIS.

amour pour la Louise. Il l’aimait de toute l’ardeur de son âme. Il l’aimait avec l’énergie, la fièvre, la fermeté dont on aime à l’âge où le cœur, entrant subitement dans la vie, croit à la possibilité de toutes les espérances, à la réalisation de tous les rêves. Il n’avait osé parler à personne de son amour. Il était certain d’avance que le Père Levac, qui était un homme fier, ne donnerait jamais sa fille à un pêcheur. Mais il finit par s’apercevoir qu’il ne déplaisait pas à la Louise. Alors, mû par l’audace des hommes habitués à la rude existence du large et poussé par cette force que l’amour donne même aux âmes les plus faibles, il prépara en silence ses projets d’avenir, et un soir, s’approchant, tremblant et timide, il dit bas à la Louise :

— Mademoiselle Louise, je vais partir pour les chantiers, là-bas, dans le lac Saint-Jean. V’la l’automne, la pêche achève. Puis la pêche ça donne pas gros d’argent. Je vais partir, puis quand je serai riche je viendrai et on se mariera tous les deux »… Il dit cela moitié sérieux, moitié rieur, mais son cœur