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LE PORTRAIT

pleine du silence de la nuit. Rien ne bougeait ; tous dormaient. Il étendit donc le bras au plafond pour saisir le fusil… Mais, il s’arrêta net : quelque chose avait remué à côté de lui, quelque chose de mystérieux… Il se pencha. Le portrait de sa mère était là accroché au mur, et les yeux de la morte vivaient tout-à-coup, le regardaient dans l’ombre avec une tristesse indicible… Il se pencha davantage pour mieux voir. Le portrait semblait vivant… Les yeux s’ouvraient, se fermaient, s’ouvraient encore pour se fixer sur lui obstinément, amoureusement… Les lèvres remuaient aussi, et il lui sembla qu’elles disaient : « Mon fils, mon fils, que vas-tu donc faire là ? Vas-tu déshonorer ton vieux père et souiller le souvenir de ta mère pour cette fille qui ne t’aime pas ? Mon enfant ! Mon enfant ! Reviens à toi ! Souffre en secret dans ton âme, garde ton mal pour toi seul… Tu verras comme tu seras content, car toute souffrance finit par être de la joie… Reviens à toi, mon enfant ! mon enfant !… » Il écouta longtemps ces mots qui vi-