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MANZONI
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renoncer à ce qu’il y a de grand dans ses traditions. Aux œuvres de Manzoni que nous avons mentionnées, il faut ajouter son livre de la Morale catholique (1819), où il combat quelques opinions de Sismondi peu favorables au catholicisme ; la Lettre sur le romantisme (1821), exposé clair et pénétrant de ses opinions sur l’école dont tous reconnaissent en lui le chef ; la Colonne infâme (1840), sorte d’appendice historique aux pages de son roman, où il traite de la peste de 1630 et du cruel procès qui s’y rattacha et où l’on condamna au supplice quelques malheureux soupçonnés d’avoir répandu la contagion par des maléfices ; le Dialogue de l’invention (1841), petit traité philosophique où il expose des doctrines philosophiques analogues à celles de Rosmini. Enfin on publia après sa mort quelques petits écrits et des fragments d’un livre sur la Révolution française. La question de la langue et l’histoire de Marie-Antoinette furent les deux sujets sur lesquels s’arrêta, dans ses dernières années, la pensée fatiguée du grand écrivain qui mourut à Milan, à l’âge de quatre-vingt-huit ans, laissant trois fils. Après la mort de sa première femme (1857), il avait épousé Thérèse Borri, veuve du comte Stampa. Sa vie, toute intérieure, ne compta que très peu d événements dont il suffit de taire une brève mention : en 1827, il fit un voyage à Florence, où il reçut le plus gracieux accueil du groupe de lettrés qui se réunissait autour du Genevois G.-P. Vieusseux, fondateur de l’Antologia et de l’Archivio Storico italiano. Patriote non militant, mais convaincu, il refusa en 1857 de recevoir la visite de l’archiduc Maximilien d’Autriche, et plus tard, il n’accepta point la croix de commandeur de la Couronne de fer que lui offrait le gouvernement autrichien. En revanche, il reçut en 1862 Garibaldi, auquel il témoigna la plus vive admiration et il accepta du gouvernement italien une pension et le titre de sénateur. En 1861, il vota la proclamation du royaume d’Italie, en 1864 le transfert de la capitale de Turin à Florence ; et, quand Rome fut devenue capitale du royaume, il n’hésita point, bien que catholique convaincu et profondément respectueux du souverain pontife, à accepter le titre de citoyen romain. Sa mort émut profondément toute l’Italie ; ses funérailles furent émouvantes, moins encore par la pompe qui y fut déployée que par la sincère douleur de tous ceux qui y assistèrent. La littérature italienne compte en lui un de ses plus grands écrivains et toute l’Europe le considère comme un des représentants les plus remarquables de ce grand phénomène littéraire qu’on appelle le romantisme ; dans les Fiancés surtout, romantique d’un genre tout différent de Victor Hugo, il a montré comment des nouvelles théories pouvaient sortir un réalisme véritable et du meilleur aloi. Guido Mazzonï.

Bibl. : Vismara, Bibliografïa Manzoniana ; Milan, 1875. — Sainte-Beuve, Portraits contemporains. — A. Stoppani, I Primi Anni di A. M. ; Milan, 1874. — A. de Guberatis, A. Manzoni ; Florence, 1879, et II Manzoni e il Fauriel studiati nel loro carteggio ; Florence, 1880. — C. Cantu, A. M., reminiscenze ; Milan, 18Nô. — G. Carducci, Due Manzoniani, dans Confessioni e Battaglie ; Rome, 1883. — L. Morandi, Le Correzioni ai Pvomessi Sposi ; Parme, 1879. — F. d’Ovidio, La Lingua dei Promessi Sposi ; Naples, 1891. — Il serait trop long d’énumérer tous les livres ou articles écrits sur Manzoni ; on trouvera l’indication des principaux dans l’exact opuscule de A. Piumati, La Vita e le opère di A. M. ; Turin, l886. Il suffira de citer ici les noms des principaux critiques qui se sont occupés de la vie et de l’œuvre de Manzoni : F. d’Ovidio, B. Zumbini, A. d’Ancona, G. Mestica, S. Stampa (en réponse à Cantù), B. Prina, A. Borgognoni, F. Galanti, L. Venturi, A. Luzio, G. Barzellotti, F. Ferrieri, A. Graf, M. Monmer, V. Waille, et de rappeler les excellents articles de F. de Sanctis et de K. Bonghi ; ce dernier est aussi l’éditeur des Opère inédite o rare di A. M., dont la publication se poursuit à Milan.


fin du tome vingt-deuxième




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