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MANTZ — MANUCE
— 1186 —


attaché, comme rédacteur d’art, au journal le Temps. La Grande Encyclopédie le comptait au nombre de ses collaborateurs. — Paul Mantz, qui n’avait pas cessé d’appartenir à l’administration, fut promu, en 1880, sous-directeur des affaires départementales et communales. L’année d’après, il était désigné pour les fonctions de directeur, puis de directeur général des beaux-arts. Mais il n’occupa que peu de temps ce poste absorbant, et la retraite qu’il prit, à la date du 20 nov. 1882, lui permit de se consacrer tout entier, durant les dernières années de sa vie, à ses chers travaux de critique et d’histoire. — Paul Mantz laisse derrière lui l’œuvre la plus estimable : son Hans Holbein (1879, in-fol.), son François Boucher (1880, in-fol.) sont des livres qui font autorité. Ou lui doit encore : une Histoire et description de l’église Sainte-Marguerite (1884, gr. in-8), et une revue du Salon de 1889, ouvrage de grand luxe (1889, in-4). Gaston Cougny.

MANUBALISTE (Art milit.). Machine de jet lançant des projectiles légers (V. Scorpion).

MANUCE ou MANUZIO (Alde), Ait Aide l’Ancien, ou le Romain, célèbre imprimeur-éditeur et humaniste italien, né à Bassiano, près de Velletri, en 1449 ou 1450, mort à Venise le 6 févr. 1515. Son prénom Aldo n’était qu’un diminutif de celui de Teobaldo, et l’origine de sa famille (dont le nom est écrit de plusieurs façons) n’est pas connue. Il fit ses études latines à Home, sous la direction de Gaspar de Vérone et de Domizio Calderino, et suivit, à Ferrare, le cours de grec du célèbre Guarini. Il devint ensuite le précepteur de l’un des fils du prince de Carpi, Alberto Pio. Très protégé par celte puissante maison, il obtint d’elle plus tard l’autorisation d’ajouter le nom de Pio au sien. En 1482, en raison de la guerre, il se réfugia à La Mirandole, auprès du célèbre savant Jean Pic, avec lequel il se rendit ensuite à Carpi, chez le neveu de ce dernier, le prince Alberto Pio. Très épris tous les trois de la littérature classique, à peine connue alors, ils conçurent ensemble le projet d’établir uneimprimerie destinée à la reproduction des chefs-d’œuvre littéraires de la Grèce et de Rome. Les bases en furent définitivement arrêtées en 1490. Antérieurement, dès 1488, Aide faisait un cours public d’explication des auteurs grecs et latins. Subventionné par les princes de Carpi, il installa, en 1494, une typographie à Venise. Ses premiers essais, tels que le poème de Musée, en grec et en latin, la Galeomyoniachia, et un petit Psautier, également en grec, parurent sans date ni nom d’imprimeur. 11 est essentiel de rappeler ici qu’avant lui, il n’avait encore été publié qu’une dizaine de livres grecs en tout, à Milan, à Venise, à Florence et à Vicence, d’une façon plus ou moins imparfaite. Aide se fit donc à cet égard un initiateur enthousiaste et persévérant du progrès matériel et littéraire. Le premier livre avec date sorti de ses presses est une grammaire de la langue grecque, Erotemata, de Constantin Lascaris, datée du 1 er févr. 1494 (1495, n. st.). Le but de cette publication, faite sumnw studio, literis et impensis Aldi Manucii ftoiiuini, fut de venir en aide aux études de la jeunesse. Dans la préface qui l’accompagne, Aide déclare avoir l’ait vœu de consumer sa vie à l’utilité publique ; il tint fidèlement cet engagement solennel. La même année aussi il fit paraître le premier volume du texte original, encore inédit, d’Aristote. Cette publication, laborieuse et difficile, en .’i vol. in-fol., fut terminée en 1498. Chaque année, il mettait au jour un ou plusieurs volumes de chefs-d’œuvre de la littérature grecque imprimés avec des types nouveaux et perfectionnés. Sa maison devint un refuge et lieu de réunion pour de savants grecs et des philhellènes. Avec leur concours, il fonda, en 1500, « l’Académie Aldine », dont la tâche était de s’occuper du choix des ouvrages à imprimer, des meilleurs manuscrits et des meilleures leçons à adopter. Grâce à cette collaboration efficace et à l’activité prodigieuse d’Aide, les publications se succédaient rapidement. Sa passion pour l’hellénisme ne lui faisait point oublier les lettres latines. Pour en faciliter la diffusion, il eut l’idée heureuse d’adopter le format petit in-octavo. Il débuta dans cette voie en 1501, par une édition de Virgile, où l’on vit en même temps apparaître pour la première fois une autre innovation, l’emploi du caractère penché, qui fut appelé aldin ou italique, et dont le modèle a été fourni par la belle écriture de Pétrarque. La gravure de ce beau caractère avait été confiée à François de Bologne, qui n’est autre que le célèbre orfèvre nielleur et peintre Francesco Raibolini, dit Francia (V. ce nom). Ce fut une véritable révolution, et ces charmants petits volumes, qui ne coûtaient chacun que 2 fr. et demi de notre monnaie, eurent un succès immense. Il publia aussi dans le même format des ouvrages grecs et italiens. Ajoutons qu’on lui doit encore un beau livre illustré : l’édition originale du texte italien de V llypnerotomaehia di Poliphilo (1499, infol. ), avec de magnifiques gravures sur bois, dont les dessins sont attribués à Mantegna et à Jean Bellini. L’activité d’Aide Manuce ne se borna pas à cela. Non content de mettre de savantes préfaces à nombre de ses publications, il voulut encore faire œuvre d’éducateur classique. Il composa une grammaire latine : Hudinicnta grammaticeslaiinœ Jm^uœ (1501, in-4), dont le succès fut durable ; puis une grammaire grecque : Grammaticœ inslitutiones greecœ (1315, in-4), qui ne parut qu’après sa mort et n’eut qu’une édition. Il maniait le latin avec aisance, même les vers, comme en témoigne son Musarum Panegyris, poème en l’honneur du prince Alberto Pio de Carpi (S. 1. n. d., avant 1489, in-4). Malgré tous ses succès et une économie sévère dans la gestion de son établissement, il ne laissa presque aucune fortune, les achats des meilleurs manuscrits des textes qu’il publiait et leur mise en œuvre ayant été fort coûteux. Mais il acquit une gloire immortelle comme typographe habile et consciencieux, aussi bien qu’à titre d’ardent promoteur de l’hellénisme renaissant. Sa marque typographique était composée d’un ancre et d’un dauphin. 11 avait épousé, en 1499, la fille d’André Torresano d’Asola, acquéreur de l’imprimerie de Nicolas Jenson, à Venise. Il eut de ce mariage une fille et trois fils, dont l’ainé vécut d’un petit bénéfice ecclésiastique, le second, Antoine, fut libraire à Bologne, et le troisième suit. Paul Manuce, né à Venise le 12 juin 1511, mort à Rome le G avr. 1574. Il n’avait pas quatre ans à la mort de son père, de sorte que ce fut son aïeul maternel qui prit la direction de l’imprimerie aldine, et c’est à ses soins qu’on est redevable, entre autres, d’un charmant livre d’Heures (1529, in-16), orné de ravissantes vignettes et d’( ncadrements d’une grande élégance. La mort de celui-ci, en 1529, ayant occasionné des dissensions domestiques, cet établissement chôma pendant quatre années. Paul se mit à sa tète en 1533, en association avec ses frères et oncles ; il en devint le chef unique en 1540. Latiniste remarquable, il professa une prédilection particulière pour Cicéron et s’appliqua surtout à la publication des bons textes de cet auteur. En 1556, il devint l’éditeur d’une nouvelle académie, Accademia Veneziana ou delta Fama, qui disparut cinq ans après, à la suite de la mort du sénateur Badoaro, son fondateur. Invité par le pape Paul IV ii s’installer à Rome pour y exécuter l’impression des Pères de l’Eglise, d’après les manuscrits delà bibliothèque palatine, il s’y rendit en 1561, et commença, deux ans après, ses éditions, qu’il imprima avec des caractères gravés à Paris. La mort du souverain pontife, en 1556, et le retrait de la subvention servie par la municipalité de Rome, firent suspendre ces impressions pendant quelque temps. 11 renonça enfin, en 1569, à la direction de l’imprimerie romaine, mais la reprit quelques années plus tard. La majeure partie de ses travaux littéraires personnels s’applique à Cicéron ; le plus important est son Comutcntarius sur les oraisons de cet auteur (1578-79, 3 vol. in-fol.). On lui doit aussi quatre traités sur les antiquités romaines : les lois, le sénat, les comices et la cité de Rome (1557 à 1585, in-fol.). Sa correspondance avec une foule de gens de marque est très instructive. 11 en a été publié sept édi-