Page:Lamirault - La Grande encyclopédie, inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts, tome 22.djvu/1244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MANTOUE
— 1184 —


1893, était de 310, 479 hab. Elle est limitée par les prov. de Crémone, Brescia, Vérone, Modène, Reggio d’Emilie et Parme. Elle est très marécageuse, couverte de rizières, de prairies et de petits bois. Elle est partagée en 14 circondari qui ont pour chefs-lieux : Asola, Bozzolo, Canneto suil’Oglio,


Castiglione delle Stiviere, Gonzaga Mantova, Ostiglia, Revere, Sermide, Viadana, et Volta Mantovana. H. Vast.

Histoire. — Mantoue est une ville très ancienne, les avantages de sa position ayant été aperçus de bonne heure. Les Étrusques s’y établirent et s’y maintinrent au point de

Palais Bonnacolsi (xiiie siècle), à Mantoue.


constituer, encore au temps de Pline, le fond de la population. Le nom a été rapproché de celui du dieu étrusque Mantus, et, par Virgile, de celui de la prophétesse Manto (V. ci-dessus). Après l’invasion gauloise, elle fut comprise dans le pays des Cénomans, mais il n’en est pas fait mention avant l’époque impériale. Elle passa comme les autres cités cénomanes de l’alliance dans la sujétion romaine. Au temps du triumvirat, Octave qui avait assigné à ses vétérans le territoire de Crémone y joignit une partie de celui de Mantoue. À cette occasion Virgile fut expulsé de son patrimoine qu’Auguste lui rendit (V. Virgile). Le poète fit la gloire de sa cité natale, que les poètes suivants célébrèrent à l’envi. Quand vinrent les invasions des Barbares, Mantoue prit une grande importance stratégique. Le roi lombard Agilulf s’en empara. Elle fut le chef-lieu d’un comté, lequel vint au xe siècle aux mains de la maison de Canossa. Après la mort de la comtesse Mathilde (1415), la ville acquit ses libertés municipales ; elle accéda en 1167 à la ligue lombarde, fut prise en 1236 par Frédéric II, mais plus tard repoussa Ezzelio da Romano. À partir de 1268, elle fut en proie aux discordes civiles. Celles-ci aboutirent à la dictature de Pinamonte Bonnacolsi, qui se fit nommer capitaine général à vie (1274). Son fils Bardellone lui succéda (1293), mais fut chassé par son neveu Guido Bonnacolsi, dit Bottigella, chef des gibelins (1299). Le frère de ce dernier, Rinaldo Bonnacolsi, dit Passerino, obtint de Henri VII le titre de vicaire impérial, s’empara de Modène, mais s’aliéna le peuple par ses cruautés et fut tué dans un soulèvement (1318). Ses fils ayant été faits prisonniers, l’autorité passa à Luigi Gonzaga, capitaine du gouvernement, lequel se fit nommer vicaire impérial par Louis IV (1329). Ce fut le fondateur d’une nouvelle dynastie.

Louis Ier, né en 1267, mort le 18 janv. 1360, s’allia aux Scaliger de Vérone qui lui cédèrent Reggio (1335), puis aux Vénitiens contre les Scaliger, les Visconti et Ferrare. Les fils de Luigi, Filippino († 1356) et Guido, défirent les Milanais à Bosgoforte (1348). L’empereur Charles IV confirma à Luigi et à ses descendants la souveraineté de Mantoue et Reggio (4354). Une nouvelle attaque des Milanais fut repoussée en 1357. — Guido, né en 1291, mort en 1369, succéda à son père ; l’autorité fut exercée par ses fils, Louis et François, qui firent périr leur aîné Ugolin (1362), gendre de Matteo Visconti. — Louis fit tuer François et régna ensuite jusqu’en oct. 1382. — Son fils Francois Ier, né en 1363, mort en mars 1407, fut mêlé aux intrigues et aux guerres des Visconti, tour à tour allié avec eux et Venise contre les Carrara de Padoue, avec Bologne contre eux.

Jean-François Ier, né en 1394, mort le 23 sept. 1444, est le premier des Mécènes qui ont illustré la famille de Gonzague. Ce fut lui qui appela à Mantoue le fameux éducateur Vittorino de Feltre. Il eut d’abord pour tuteur son oncle maternel Caries Malatesta. Le pape Jean XXIII le prit pour général des troupes de l’Église contre le roi de Naples Ladislas. Il défendit Bologne contre Malatesta, commanda l’armée de la coalition (Venise, Florence, Este, Montferrat) contre Milan (1425-33). Il reçut à Mantoue l’empereur Sigismond qui lui donna le titre de marquis. Passé aux Milanais, il défit François Sforza, général des troupes vénitiennes, florentines et génoises (1438-41). De sa femme Paola Malatesta († 1452), naquirent Louis III, Carles, seigneur deBozzolo ; Alexandre, seigneur de Castillon ; Jean-Louis, seigneur de Rovigo et Capriana ; la savante Cécile.

Louis III, dit le Turc, né le 5 juin 1414, mort à Goito le l2 juin 4478, élève de Vittorino de Feltre et du condottiere Piceinino, eut à combattre son frère Caries († 1456). Il entretint une belle armée qu’il louait aux princes voisins ; il embellit Mantoue. De sa femme Barbe de Brandebourg il eut plusieurs fils, fondateurs de lignes princières (V. Gonzague). — Son fils Frédéric Ier, né en 1439, mort le 15 juil. 1484, guerroya au service du duc de Milan. — Son fils Jean-François II, quatrième marquis de Mantoue, né le 10 août 1466, mort le 29 mars 1519, servit les Vénitiens (1494), devint leur généralissime, puis capitaine général de l’empereur, puis commandant en chef des troupes de Ludovic Sforza (1498), servit ensuite le roi de France Louis XII (1500) dont il fut vice-roi à Naples (1503) ; il soumit Bologne pour le compte du pape Jules II (1506), Gènes pour celui de XII, se brouilla avec celui-ci qui lui avait pris Peschiera (1509), fut battu par les Vénitiens devant Vérone, fait prisonnier (9 août 1509), relâché à la demande de Jules II qui le nomma gonfalonier de l’Église. Il avait épousé en 1490 Isabelle d’Este († 1539) et forma avec elle un couple princier célèbre parmi les souverains de la Renaissance par son amabilité, son goût et son jugement éclairé ; si la modicité de leurs ressources n’autorisait pas de grandes libéralités, ils accordèrent aux lettres et aux artistes une entière liberté. Isabelle composa une superbe collection d’œuvres d’art, fit faire son portrait