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BORNÉO - BORNÉOL

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les Olo-Ot et les Pounans. Les habitations sont d’énormes maisons communes, sorte de phalanstères qui abritent parfois jusqu’à deux cents personnes ; elles se dressent sur des pilotis à 2 ou 5 m. au-dessus du sol et ont souvent 250 m. de long. Elles sont divisées par un long couloir en deux parties : un vaste hangar servant de cuisine et de salon à toute la communauté d’une part, et une série de chambres qui forment les appartements privés des familles, de l’autre. Ces habitations sont garnies de nattes, de quelques ustensiles de ménage, d’une poterie primitive et d’instruments de musique parmi lesquels le plus remarquable est une espèce d’orgue primitif formé d’une courge et de tubes en bambou de différentes dimensions, munis de trous.

La plupart des tribus dayaks sont agriculteurs et chasseurs ; celles qui s’approchent des côtes s’occupent aussi de la pêche et de la récolte de nids d’hirondelles. Les tribus des montagnes, comme les Pounans et les Olo-Ot, ne connaissent point l’agriculture et mènent une vie nomade, récoltant les fruits et les racines sauvages ou chassant les animaux des forêts.

Les idées religieuses des Dayaks sont encore peu connues. On prétend qu’ils croient à un être suprême, créateur de tout l’univers ; mais les noms mêmes dont ils se servent pour désigner cet être : Mahatara, Natalla (Allah), Djebata (Devata) indiquent que c’est une idée empruntée aux Hindous ou aux Arabes, par les tribus qui se seraient trouvées en rapports avec ces peuples. Les vrais Dayaks ne croient qu’aux esprits (sanggiangs) hons ou méchants en l’honneur desquels ils édifient des statues en bois ou en pierre représentant le plus souvent un bonhomme tirant une langue énorme. Une caste spéciale de femmes-prêtresses, les Balians, sert d’intermédiaire entre les esprits et les simples mortels ; les Balians sont en même temps danseuses, chanteuses, filles publiques et sorcières -guérisseuses. Dans quelques tribus, on rencontre aussi des hommessorciers appelés Basirs. L’usage du tabou est commun parmi les Dayaks ; nombre d’objets deviennent sacrés pour des causes diverses et nul ne peut les toucher qu’après un laps de temps déterminé, quand, à l’aide de sacrifices, le tabou est levé par une Balian. Beaucoup de Dayaks, surtout sur la côte 0., ont embrassé l’islamisme dont ils ne connaissent souvent que les pratiques extérieures. Les cérémonies accompagnant la naissance, le mariage ou la mort, sont fort simples et consistent principalement en festins pendant lesquels l’on danse et l’on mange beaucoup et l’on fait aussi parfois des sacrifices humains ; les victimes de cette pratique horrible sont ordinairement des esclaves de guerre. Dans les tribus restées les plus pures, le fiancé est obligé de présenter un nombre déterminé de crânes et de têtes d’ennemis avant de pouvoir se marier.

La langue dayak appartient à la famille linguistique maléo-polynésienne ; elle se subdivise en plusieurs dialectes qui diffèrent sensiblement l’un de l’autre. Rien que dans le S.-E. de l’Ile, MM. Hardeland et Von Gabelentz distinguent quatre dialectes différents. Dans le N.-O., la langue dayak a emprunté beaucoup de mots au malais, au javanais et au bouginais. Les prêtres et les prêtresses se servent d’un langage spécial, le basa sanggiang, dont l’étude est interdite aux profanes. Les Dayaks n’ont pas de système spécial de supputation du temps et se servent de celui des Chinois et des Malais ; ils ne sont pas forts non plus dans les arts graphiques. Par contre , ils excellent dans l’art de forger et de fondre les métaux et dans les travaux de tressage.

2° Les Malais. — Les premiers émigrants de race malaise sont venus à Bornéo vers le xm e siècle. C’étaient les Malais de Singapour ; ils occupèrent la côte de Brounei. Un peu plus tard (aux xiv e et xv e siècles), un nombre considérable d’Hindo-Javanais émigrèrent dans l’Ile après la destruction du royaume de Madjapahit (Java) et s’installèrent sur la côte 0., à Soukadana, dans le district de Matan, etc. Les Bouginais vinrent ensuite et colonisèrent la même côte à Mampava et à Pontianak vers le xvn e et le xv» !" siècle. L’occupation de la côte S. et de la côte E. ne date également que de deux ou trois siècles. Sur tout le littoral, les Javanais, les Malais proprement dits et les Bouginais se sont tellement fondus qu’il ne peut être question que d’une seule population malaise de la côte de Bornéo. Dans certains points ils se mélangèrent également aux Dayaks et formèrent des populations mixtes comme celle des Bissayans de Brounei et des Bouled-Oupi des possessions anglaises du Nord-Bornéo ; chez ces derniers on reconnaît le mélange de caractères malais (brachycéphalie, petite taille) avec les caractères dayaks (nez droit, teint clair, etc.).

3° Les Chinois. — Les marins chinois visitaient Bornéo déjà au v e siècle ; mais ce n’est que depuis le xvi» siècle que commença l’immigration régulière. Elle se porta d’abord vers les districts agricoles du N.-O. et de l’O. de l’ile, puis, au xvm 8 siècle, dans les districts miniers de l’ouest (Mampava, Sambas, Pontianak). Cette immigration continue de nos jours. Les Chinois se tiennent à l’écart du reste de la population et forment entre eux des sociétés secrètes (King-sij, sorte d’Etat dans l’Etat. Ce n’est que dans le N.-E. de Bornéo qu’ils se sont mélangés avec les Dayaks et les Malais pour former la population connue sous le nom de Dousouns.

4° Autres étrangers. — Les Arabes vinrent dans l’ile au commencement du xvi e siècle, et c’est de cette époque que date aussi l’introduction de l’islamisme à Bornéo. Ils se sont pour la plupart mélangés avec les Malais et les autres peuplades, et il est rare de rencontrer un Arabe pur dans l’Ile. Les Soulouans, habitants des îles Soulous, qui entrent pour une large part dans le mélange des peuples de la côte nord-est, ont également du sang arabe dans leurs veines. Les Anglais et les Hollandais, dominateurs politiques de Bornéo, de même que les Eurasiens, sont trop peu nombreux pour influencer en quoi que ce soit le groupement ethnique de l’ile. Au point de vue religieux, les résultats des efforts des missionnaires chrétiens sont à peu près nuls jusqu’à présent. J. Deniker.

BORNÉOL. I. Chimie. — Formules j Jj™^* C q°o%Iq] Syn. : Camphre de Bornéo, Alcool campholique. On donne ce nom au camphre solide contenu dans le Dryobalanops camphora, où on le rencontre sous l’écorce des vieux arbres. Il a été d’abord étudié par Pelouze, mais sa fonction véritable a été reconnue seulement par M. Berthelot, qui en a fait également la synthèse. L’alcool campholique peut se présenter, suivant sa provenance, sous plusieurs formes isomériques, qui ne diffèrent entre elles que par la valeur de leur pouvoir rotatoire, les unes déviant à droite, les autres à gauche, comme l’indique le tableau ci-dessous : Bornéol du dryobalanops . . [a] = -+- 33°4

— artificiel [a] = + 44°9

— du succin [«] = + 4°1

— de garance M — — 33°4.

L’isomériese poursuit dans les dérivés. Ainsi le camphre ou aldéhyde campholique, C 2O H 16 2 , produit régulier d’oxydation, a un pouvoir rotatoire égal à + 45°, lorsqu’il dérive du camphre de Bornéo ; il est seulement de -+- 9°, s’il provient du bornéol du succin, et il est lévogyre lorsqu’il résulte de l’oxydation du bornéol de la garance.

Le camphre de Bornéo s’obtient aisément à l’état de pureté par sublimation. On peut le reproduire syntuétiquement en fixant deux équivalents d’hydrogène sur le camphre ordinaire (Berthelot) :

C*oh4602 + H 2 = C 20 H 1S 2 .

A cet effet, on chauffe le camphre à 180°, en tubes scellés, avec une solution alcoolique de potasse, ce qui