Page:Lambton - Rapport de Lord Durham.djvu/37

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34

vers cette politique conciliatoire qui est le sujet de leur amère souvenir ; car ils sentent qu’étant en minorité, un retour au système régulier d’un gouvernement constitutionnel les rendrait de nouveau soumis à une majorité française ; et je suis persuadé qu’ils ne se soumettraient jamais à cela paisiblement. Ils n’hésitent pas à dire qu’ils ne souffrirons pas beaucoup plus longtemps d’être le jouet des partis dans la mère-patrie, et que si celle-ci oublie ce qui est dû aux hommes loyaux et entreprenants de leur race, ils doivent se protéger eux-mêmes. Dans le langage significatif d’un de leurs plus chauds avocats, ils disent que « le Bas-Canada doit être anglais, au risque, s’il est nécessaire, de n’être pas britannique. »

Dans une dépêche plus récente que celle à laquelle j’ai si souvent eu occasion de référer, j’ai appelé l’attention du gouvernement anglais & l’accroissement de cet état alarmant des sentiments de la population anglaise. Les derniers troubles, et l’aide que les Insurgés français ont reçu de quelques-uns des Citoyens des États-Unis, ont été la cause d’une grande exaspération parmi les Canadiens loyalistes contre le gouvernement et le peuple américain. Leurs Gazettes ont dénoncé dans les termes les plus forts la bonne foi des autorités, le caractère et la morale du peuple, ainsi que les institutions politiques des États-Unis. Néanmoins sous cette apparence d’hostilités, l’on peut facilement trouver un penchant entraînant à des sentiments contraires. Comme l’opinion générale du peuple américain devenait de plus en plus apparente dans le cours de l’an dernier, les Anglais du Bas-Canada furent surpris de la force de la sympathie réelle de leurs voisins républicains en faveur des vues de la minorité, et cela en dépit des premières manifestations de sympathie avec un peuple qui était supposé lutter pour l’indépendance. Sans abandonner leur attachement à la mère-patrie, les Anglais du pays ont commencé, comme des hommes qui vivent dans un état d’incertitude le font ordinairement, par calculer les conséquences probables d’une séparation, si malheureusement elle arrivait, et qu’elle fût suivie d’une incorporation avec les États-Unis. En dépit du choc, que cela porterait à leurs sentiments, ils croient qu’ils trouveraient une compensation dans l’avancement de leurs intérêts. Ils croient que par l’émigration américaine, ils placeraient en bien peu de temps la race anglaise dans la majorité ; ils parlent fréquemment et hautement de ce qui est arrivé à la Louisiane, où par des moyens qui ne sont pas ceux qu’ils disent, le but cependant d’assurer une prépondérance anglaise sur la population française, a sans aucun dôme été atteint. Ils assurent avec confiance que les Américains régleraient bien promptement les prétentions des Français ; et ils