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Et cette nationalité Canadienne Française, devrions-nous pour le simple avantage de ce peuple, chercher à la perpétuer, même si nous pouvions le faire ? Je ne connais pas de distinctions nationales marquant et continuant une infériorité plus désespérée. La langue, les lois, et le caractère du continent de l’Amérique Septentrionale sont Anglais ; et toute autre race que l’Anglaise (j’applique ce mot à tous ceux qui parlent l’Anglais) parait y être dans un état d’infériorité. C’est pour les faire sortir de cette infériorité que je désire donner aux Canadiens notre caractère Anglais. Je le désire pour l’avantage des classes instruites, que la distinction du langage et des usages tient séparés du grand empire auquel ils appartiennent. Le meilleur sort du colon instruit et qui désire s’avancer, présente maintenant peu d’espoir et d’activité, mais le Canadien Français se trouve jeté encore plus loin dans l’ombre par une langue et des habitudes étrangères à celles du gouvernement impérial. Un esprit d’exclusion a fermé les professions les plus élevées aux classes instruites parmi les Canadiens Français, plus peut-être qu’il n’était nécessaire ; mais il est impossible qu’avec la plus grande libéralité le Gouvernement Britannique donne à ceux qui parlent une langue étrangère une position égale dans la concurrence générale de sa vaste population. Je désire l’amalgamation encore plus pour l’avantage des basses classes. Leur état actuel commune et égale aisance se détériore rapidement par le trop-plein de la population dans les étroites limites dans lesquelles ils sont renfermés. S’ils essaient d’améliorer leur condition, en s’étendant sur le pays environnant, ils se trouveront nécessairement de plus en plus mêlés à une population Anglaise ; s’ils préfèrent rester stationnaires, la plus grande partie devront devenir hommes de peine dans l’emploi des capitalistes Anglais. Dans l’un et l’autre cas, il paraîtrait que les Canadiens Français sont destinés, en quelque sorte, à occuper une position inférieure, et à dépendre des Anglais pour se procurer de l’emploi. Les maux de la pauvreté et de la dépendance ne pourraient qu’être décuplés par un esprit de nationalité jalouse et rancuneuse, qui séparerait la classe ouvrière de la société des possesseurs de la richesse et de ceux qui fournissent de l’emploi.

Je n’entrerai pas ici dans la question de l’effet de la manière de vivre et de la division des biens parmi les Canadiens Français sur le bonheur du peuple. J’admettrai pour le moment, qu’elles sont aussi productives de bien-être que le prétendent leurs admirateurs. Mais, bonnes ou mauvaises, le temps n’est plus où elles pouvaient subsister ; car il ne reste pas assez de terre inoccupée dans la partie du pays où les Anglais ne sont pas déjà établis, pour que la présente population Canadienne Française possède assez de fermes pour lui fournir, avec son présent système de culture, les moyens de subsistance qu’elle a aujourd’hui. Aucune population ne s’est plus accrue par les simples naissances que l’ont fait les Canadiens Français depuis la conquête. À cette époque on portait leur nombre à 60,000 ; on suppose que ce chiffre est maintenant, de sept fois autant. Il n’y a pas eu d’augmentation proportionelle en culture ; et l’augmentation de la population s’est soutenue en grande partie par la subdivision continuée des propriétés. Dans