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10 SEPTEMBRE.

demi-heure durant. Nous pleurions tous, mon père, ma mère et moi ; nous séchions nos larmes en parlant de la France ; nous repleurions, nous nous réembrassions. Mes trois quarts d’heure se passèrent ainsi. Notre enthousiasme patriotique était si grand qu’il domina nos faiblesses et adoucit nos déchirements intimes. Ce fut mon Alice qui, la première, parla de ma réponse à Jules Favre, et me dit qu’elle approuvait sa mère d’avoir écrit cette lettre :

— Sois patriote, sois républicaine, sois Française, me dit-elle ; il faut que tu sois tout cela pour deux, puisque tu m’éloignes du danger.

Je craignais qu’elle ne me demandât de revenir à Paris ; je l’arrêtai :

— Toutes les mères ont fait comme moi, lui répondis-je, toutes celles qui ont pu.

— Ne crains rien, dit-elle en m’interrompant avec vivacité, je ne t’occuperai pas de ma personne dans un moment pareil ; fais ton devoir et oublie-moi.

Sur ces paroles, difficiles à prononcer et difficiles à entendre, nous recommençâmes tous qua-