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LE SIÉGE DE PARIS.

Hier, toute l’après-midi, au Conservatoire, dans la salle des concours, où j’ai installé un atelier de lingerie, où l’on fait de la charpie, des bandes, des compresses unies et fenestrées, où l’on prépare des appareils Scultet, des pinceaux, des mèches, etc., les murs ont entendu les imprécations tragiques de vingt Parisiennes appartenant à des classes différentes : ouvrières, bourgeoises, artistes, commerçantes. Nous maudissions les Prussiens et les lâches. Nous étions sous le coup du honteux combat de Châtillon. La plupart de nos soldats avaient fui ; un grand nombre de mobiles, blessés dans le dos, accusaient leurs chefs de s’être cachés ; les zouaves, pris de terreurs inexplicables, se croyant poursuivis, étaient rentrés dans Paris, semant partout l’inquiétude, mais ne parvenant pas à propager leur épouvante.

Le mot imprécation peut seul rendre la violence de nos paroles. Je compris, pour la première fois, les emportements, les passions, les énormités de 92. J’aurais vu, sans broncher, fusiller les déserteurs. Nos gardes nationaux