Page:Lamartine - Méditations poétiques (édition de 1820).djvu/94

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De la lampe qui brûle auprès des saints autels.
Seule elle luit encor, quand l’univers sommeille :
Emblème consolant de la bonté qui veille
Pour recueillir ici les soupirs des mortels.

Avançons. Aucun bruit n’a frappé mon oreille ;
Le parvis frémit seul sous mes pas mesurés ;
Du sanctuaire enfin j’ai franchi les degrés.
Murs sacrés ! saints autels ! je suis seul, et mon ame
Peut verser devant vous ses douleurs et sa flamme,
Et confier au ciel des accents ignorés,
Que lui seul connaîtra, que vous seuls entendrez.

Mais quoi ! de ces autels j’ose approcher sans crainte !
J’ose apporter, grand Dieu, dans cette auguste enceinte
Un cœur encor brûlant de douleur et d’amour !
Et je ne tremble pas que ta majesté sainte
Ne venge le respect qu’on doit à son séjour !
Non : je ne rougis plus du feu qui me consume :
L’amour est innocent quand la vertu l’allume.
Aussi pur que l’objet à qui je l’ai juré,
Le mien brûle mon cœur, mais c’est d’un feu sacré ;
La constance l’honore et le malheur l’épure.
Je l’ai dit à la terre, à toute la nature ;
Devant tes saints autels je l’ai dit sans effroi :
J’oserais, Dieu puissant, la nommer devant toi.
Oui, malgré la terreur que ton temple m’inspire,
Ma bouche a murmuré tout bas le nom d’Elvire ;