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mère. Ils étaient cousin et cousine, frère et sœur, beau-frère et belle sœur, oncle et tante, neveu et nièce avec tous ceux et toutes celles des deux autres huttes dont vous avez vu les décombres en monceaux et les petits vergers en genêts et en friche en montant vers chez nous. Le creux de la gorge, la pente de la montagne, les bruyères, les genêts et l’enclos où nous sommes étaient toujours restés indivis entre les trois maisons de proches parents. Chacun prenait un champ ou l’autre, et le cultivait pour avoir le seigle ou les pommes de terre de l’année. Les bêtes paissaient où elles voulaient en commun. Quand venait la saison de battre les châtaigniers, les hommes et les garçons montaient sur les arbres, les femmes et les jeunes filles se tenaient dessous pour les ramasser. On faisait trois sacs de la récolte plus ou moins égaux, selon le nombre des enfants de chaque maison, et chacun prenait le sien. Voilà comment on vivait aux Huttes, monsieur. Il y avait un des trois cousins pères des familles qui était coquetier, et qui allait vendre et acheter des châtaignes et des prunes par les hameaux et dans les foires. L’autre était rémouleur ; il partait après la moisson avec sa meule de grès montée sur quatre fins montants de sapin,