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il commençait à être la victime. Mais ce philosophe estimait plus le bien fait au peuple que sa faveur. Plus ambitieux de le servir que de le gouverner, il montrait déjà contre les calomnies de ses ennemis l’impassibilité héroïque qu’il montra plus tard contre la mort.

Cette voix du philosophe se perdit dans le tumulte des prochaines élections municipales. Deux hommes se disputaient les suffrages pour cette place de maire de Paris. À mesure que l’autorité royale baissait et que l’autorité de la constitution s’anéantissait dans les troubles du royaume, le maire de Paris pouvait devenir le véritable dictateur de la capitale.

Ces deux hommes étaient La Fayette et Pétion : La Fayette, porté par le parti constitutionnel et par les citoyens de la garde nationale ; Pétion, porté par les Girondins et par les Jacobins à la fois. Le parti royaliste, en se prononçant pour ou contre un de ces deux hommes, était maître de l’élection. Le roi n’avait plus l’influence du gouvernement, qu’il avait laissée échapper de ses mains, mais il avait encore l’influence occulte de la corruption sur les meneurs des différents partis. Une partie des vingt-cinq millions de son revenu était employée par M. de Laporte, intendant de la liste civile, et par MM. Bertrand de Molleville et de Montmorin, ses ministres, à acheter des voix dans les élections, des motions dans les clubs, des applaudissements ou des huées dans les tribunes de l’Assemblée. Ces subsides secrets, qui avaient commencé par Mirabeau, descendaient très-bas dans la lie des factions. Ils soldaient la presse royaliste et se glissaient même dans les mains des orateurs et des journalistes en apparence les plus acharnés contre la cour. Beaucoup de fausses manœuvres, conseillées