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rels, et reconnaît, au-dessus de tous les droits de l’individu, le droit de la société, qui les résume tous et qui les domine comme le tout domine la partie. Il restreint la liberté politique au droit du citoyen de tout faire, pourvu qu’il ne nuise pas à la patrie ; mais il l’arrête là. L’homme, sans doute, peut matériellement user de ce droit d’abdiquer la patrie où il est né, et à laquelle il se doit comme le membre se doit au corps ; mais cette abdication est une trahison. Elle rompt le pacte entre la nation et lui. La nation ne doit plus de protection ni à sa propriété ni à sa personne. Après avoir, d’après ces principes, renversé la puérile distinction entre l’émigré fonctionnaire et les simples émigrés, il démontre qu’une société tombe en décadence si elle se refuse à elle-même le droit de retenir ceux qui la désertent dans ses périls. En lui donnant l’univers pour patrie, elle lui ôte celle qui l’a vu naître ; mais que sera-ce si l’émigré, cessant d’être un fugitif, devient un ennemi, et si les rassemblements de ses pareils entourent la nation d’une ceinture de conspirateurs ? Quoi ! l’attaque sera-t-elle licite aux émigrés, la défense interdite aux bons citoyens ?


XVI

« Mais la France, poursuit-il, est-elle dans ce cas ? A-t-elle quelque chose à craindre de ces hommes qui vont implorer les haines des cours étrangères contre nous ? Non, sans doute ; bientôt on verra ces superbes mendiants qui vont