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pas à la guerre, ils auraient sauvé leur parti et dominé le trône. L’honnêteté, qui manquait à leur chef, manqua à leur conduite ; l’intrigue les entraîna. Ils se firent les agitateurs d’une assemblée dont ils pouvaient être les hommes d’État. Ils n’avaient pas la foi à la république, ils en simulèrent la conviction. En révolution, les rôles sincères sont les seuls rôles habiles. Il est beau de mourir victime de sa foi, il est triste de mourir dupe de son ambition.


VI

Trois causes de trouble agitaient les esprits au moment où l’Assemblée prenait les affaires : le clergé, l’émigration, la guerre imminente.

L’Assemblée constituante avait fait une grande faute en s’arrêtant à une demi-mesure dans la réforme du clergé en France. Mirabeau lui-même avait faibli dans cette question. La Révolution n’était, au fond, que l’insurrection légitime de la liberté politique contre le despotisme et de la liberté religieuse contre la domination légale du catholicisme, devenu en France une sorte d’institution politique. La constitution avait émancipé le citoyen ; il fallait émanciper le fidèle et arracher les consciences à l’État pour les rendre à elles-mêmes et à Dieu. C’est ce que voulait la philosophie, qui n’est que l’expression rationnelle du génie.

Les philosophes de l’Assemblée constituante reculèrent