Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/280

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contre-révolutionnaires qui existaient entre le roi et les puissances étrangères, non moins qu’entre le roi et les chefs de l’émigration. Les Mémoires de l’émigration sont pleins de ces indices. La nature même les atteste. La cause des rois, des aristocraties et des institutions ecclésiastiques, était solidaire. L’empereur Léopold était frère de la reine de France ; les dangers du roi étaient les dangers de tous les princes. L’exemple du triomphe d’un peuple était contagieux pour tous les peuples. Les émigrés étaient les amis de la monarchie et les défenseurs du roi. On ne se serait pas parlé qu’on se serait entendu par les mêmes pensées, par les mêmes intérêts. Mais, de plus, on s’entendait par des communications concertées. Les soupçons du peuple n’étaient point tous des chimères ; ils étaient le juste pressentiment des complots de ses ennemis.

La conjuration de la cour avec toutes les cours, des aristocraties du dehors avec toutes les aristocraties du dedans, des émigrés avec leurs parents, du roi avec ses frères, n’avait pas besoin d’être écrite. Louis XVI lui-même, le plus sincèrement révolutionnaire de tous les hommes qui ont occupé un trône, n’avait pas une pensée perverse de trahison envers la Révolution, ni de trahison envers son peuple, en implorant le secours ou des démonstrations armées des puissances. Cette pensée d’un appel aux forces étrangères ou même aux forces de l’émigration n’était pas le fond de son âme. Il craignait l’intervention des ennemis de la France, il désapprouvait l’émigration, il n’était pas sans ombrage contre ses propres frères intriguant au dehors, quelquefois en son nom, mais souvent contre son gré. Il lui répugnait de passer aux yeux de l’Europe pour un prince en tutelle, dont les frères ambitieux prenaient les