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L’heureuse Toscane, policée et illustrée par les Médicis, ces Périclès de l’Italie, était savante, agricole, industrieuse, nullement militaire. La maison d’Autriche la gouvernait par ses archiducs. Ces princes du Nord, transportés dans les palais bâtis par les Pitti pour les Côme, y prenaient les mœurs douces et élégantes des Toscans. Le climat et la sérénité des collines de Florence y adoucissaient jusqu’à la tyrannie. Ces princes y devenaient des voluptueux ou des sages. Florence, la ville de Léon X, de la philosophie et des arts, avait transformé jusqu’à la religion. Le catholicisme, si âpre en Espagne, si sombre dans le Nord, si austère et si littéral en France, si populaire à Rome, à Florence était devenu, sous les Médicis et sous les philosophes grecs, une espèce de théorie platonique et lumineuse dont les dogmes n’étaient que de sacrés symboles, et dont les pompes n’étaient que des voluptés de l’âme et des sens. Les églises de Florence étaient les musées du Christ bien plus que ses sanctuaires. Les colonies de tous les arts et de tous les métiers de la Grèce avaient émigré à Florence, lors de l’entrée de Mahomet II à Constantinople ; ils y avaient prospéré. Une nouvelle Athènes, peuplée, comme l’ancienne, de temples, de portiques et de statues, éclatait aux bords de l’Arno.

Léopold, le prince philosophe, y attendait, dans l’étude du gouvernement des hommes et dans la pratique des théories de l’économie politique nouvelle, le moment de monter sur le trône impérial de la maison d’Autriche. Sa destinée ne devait pas l’y laisser longtemps. C’était le Germanicus de l’Allemagne. La philosophie ne devait que le montrer au monde, après l’avoir prêté quelques années à l’Italie.

L’État piémontais, dont les frontières pénétraient jusque