Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/182

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec curiosité à ces caractères, qui semblent contenir dans quelques signes le mystère de toute une vie et l’horreur de toute une époque. Ici c’est Chaumette, alors étudiant en médecine, rue Mazarine, n° 9. Là c’est Maillard, le président des massacres de septembre. Plus loin Hébert ; au-dessous Henriot, le général des suppliciés de la terreur. La signature grêle et effilée d’Hébert, qui fut depuis le Père Duchesne ou le Peuple en colère, a la forme d’une araignée qui étend ses pattes sur sa proie. Santerre a signé plus bas. C’est le dernier nom qui signifie un homme connu. Les autres ne signifient que la foule. On voit que des multitudes de mains hâtives et tremblantes sont venues apporter en désordre leur ignorance ou leur fureur sur ce papier. Beaucoup même de ces mains ne savaient pas écrire. Un cercle d’encre et une croix au milieu du cercle attestent leur volonté anonyme. Quelques noms de femmes s’y lisent. On y reconnaît beaucoup de noms d’enfants, à l’incertitude de la main guidée par une main étrangère. Pauvres enfants qui confessaient la foi de leurs parents sans la comprendre, et qui signaient les passions du peuple avant de pouvoir balbutier la langue des hommes faits !


XIV

Le corps municipal avait été informé à deux heures des meurtres commis au Champ de Mars et des insultes faites à la garde nationale envoyée pour dissiper le rassemblement.