Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/141

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

naux. Un des membres du côté gauche de l’Assemblée, le vicomte de Noailles, s’approcha avec empressement de la reine et lui offrit son bras. La reine indignée rejeta, avec un regard de ressentiment, la protection d’un grand seigneur libéral ; elle aperçut un député de la droite et lui demanda son bras. Tant d’abaissement avait pu l’abattre, mais non la vaincre. La dignité de l’empire se retrouvait tout entière dans le geste et dans le cœur d’une femme.

Les clameurs prolongées de la foule à l’entrée du roi aux Tuileries annoncent à l’Assemblée son triomphe. L’agitation interrompit la séance pendant une demi-heure. Un député, se précipitant dans la salle, rapporte que les trois gardes du corps étaient entre les mains du peuple, qui voulait les mettre en pièces. Vingt commissaires partirent à l’instant pour les sauver. Ils rentrèrent quelques minutes après. La sédition s’était apaisée devant eux. Ils avaient vu, dirent-ils, Pétion couvrant de son corps la portière de la voiture du roi. Barnave entra, monta à la tribune tout couvert de la poussière de la route. « Nous avons rempli notre mission, dit-il, à l’honneur de la France et de l’Assemblée. Nous avons préservé la tranquillité publique et la sûreté du roi. Le roi nous a dit qu’il n’avait jamais eu l’intention de passer les limites du royaume. (On murmure.) Nous avons marché rapidement jusqu’à Meaux, pour éviter la poursuite des troupes de M. de Bouillé. Les gardes nationales et les troupes ont fait leur devoir. Le roi est aux Tuileries. » Pétion ajouta, pour flatter l’opinion, qu’à la descente de voiture, on avait voulu, il est vrai, s’emparer des gardes du corps, que lui-même avait été pris au collet et arraché de son poste auprès de la portière, mais que ce mouvement du peuple était légal dans son intention, et n’a-