Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/274

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tente de son père, rejoignit le prince, qui l’attendait à l’entrée du camp. Il la plaça en croupe sur sa jument, et s’élança dans la plaine. Mais la célérité de la fuite n’avait pu la dérober à l’œil jaloux de Tamer : amoureux de sa cousine et déterminé à soutenir ses droits, il surveillait depuis longtemps les démarches de son rival, et montait lui-même la garde toutes les nuits auprès de la tente de Camare. Il faisait sa ronde autour du camp lorsque les amants s’échappèrent ; il les aperçut, et se mit à leur poursuite. La jument de Fehrab, qui avait la vitesse naturelle à la race de Nedgdié, pressa encore sa course, stimulée de toute l’impatience de son maître ; mais, chargée du poids de deux personnes, le moment arriva où elle n’eut plus la force d’obéir aux coups redoublés de l’étrier : elle tombe. Fehrab voit Tamer près de l’atteindre : il dépose à terre son amante, et s’apprête à la défendre. Le combat fut terrible et l’issue tragique. Tamer vainqueur tue Fehrab et s’empare de sa cousine ; mais, épuisé de fatigue et désormais plein de sécurité, il s’endort un moment à ses côtés. Camare, qui épie son sommeil, saisit le sabre teint du sang de son amant, coupe la tête à son ravisseur, se précipite elle-même sur le fer de sa lance, et se perce le cœur. Tous trois furent trouvés ainsi par ceux qui étaient allés à leur recherche.

Une guerre meurtrière entre les deux tribus suivit ce triste événement ; celle de Fehrab, soutenue par les Wahabis, força à la retraite celle de Beny-Tay[1], qui vint avec

  1. La tribu Beny-Tay, composée de 4,000 tentes ; celle de El-Hamarnid, 1,500 tentes ; celle de El-Daffir, 2,500 tentes ; celle de El-Hegiager, 800 tentes ; enfin celle de El-Khresael, 3,000 tentes.