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temps de les poursuivre. Les nôtres, s’attendant à quelque attaque, étaient préparés ; mais il fallait découvrir de quel côté se trouvait l’ennemi. La nuit étant venue, quatre hommes descendirent de cheval, prirent des directions opposées, et, se couchant à plat ventre, l’oreille contre terre, entendirent ainsi à une très-grande distance les pas des ravisseurs. La nuit se passa sans pouvoir les atteindre ; mais, au matin, la troupe de Hassnné[1] les ayant rejoints, leur livra bataille. Après un combat de quatre heures, la moitié des troupeaux fut reprise ; mais cinq cents chameaux restèrent au pouvoir de la tribu El-Daffir. Nous eûmes dix hommes tués et plusieurs blessés. Au retour, l’affliction fut générale ; les Bédouins murmuraient, accusant le caprice et la vanité de Nasser de tout ce qui était arrivé. Mehanna envoya un courrier à son fils, qui revint aussitôt de Damas accompagné d’un chokredar[2], pour imposer aux Bédouins. À son arrivée, il fit lecture d’une lettre du pacha, conçue en ces termes :

« Nous faisons savoir à tous les émirs et scheiks des tribus du désert, grandes et petites, campées sur le territoire de Damas, que nous avons nommé notre fils, Nasser-Ebn-Mehanna, émir de tous les Anazès[3], les invitant à lui obéir. — La tribu qui aura le malheur de se montrer rebelle sera détruite par nos troupes victorieuses, et, pour servir d’exemple, ses troupeaux seront égorgés, et ses femmes livrées aux soldats. Telle est notre volonté.

» Signé Soliman, pacha de Damas et d’Acre. »
  1. Nom de la tribu de Mehanna.
  2. Grand officier du pacha.
  3. Bédouins du désert.