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dans la mêlée humaine ! Du silence après le bruit, de l’obscurité douce après le grand jour, du repos après l’agitation. Un nid d’ombre et de solitude pour réfléchir à la vie passée, et mourir en paix et en amitié avec la nature et les hommes. Pour moi-même, je ne fais plus de vœu, je ne demande même pas cela : ma solitude ne sera ni si belle ni si douce.

Descendu du caïque, je suis les bords du ruisseau jusqu’à un kiosque que je vois blanchir entre les arbres. À chaque tronc j’aperçois un groupe de femmes turques et arméniennes qui, entourées de beaux enfants jouant sur la pelouse, prennent leur repas à l’ombre. Des chevaux de selle superbement enharnachés, et des arabas, voitures de Constantinople, attelés de bœufs, sont épars sur la prairie. Le kiosque est précédé et entouré d’un canal et de pièces d’eau, où nagent des cygnes. Les jardins sont petits, mais la prairie entière est un jardin. Là venait souvent, jadis, le sultan actuel passer les saisons de chaleur. Il aimait ce délicieux séjour, parce que ce séjour plaisait à une odalisque favorite. L’amour avait trouvé place dans ce cœur après les massacres de l’Atméidan ; et, au milieu des sensualités du harem, la belle odalisque mourut ici. Depuis ce temps, Mahmoud a abandonné ce beau lieu. Le tombeau de l’odalisque est souvent, dit-on, visité par lui, et consacre seul les jardins de ce palais abandonné. Journée passée au fond de la vallée, à l’ombre des arbres. Vers écrits à V..