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arches souterraines de ce beau palais, encombrées de débris et de pierres ; les murs et les escaliers que j’eus le temps d’entrevoir me parurent du plus élégant travail. Arrivés là, près d’une des portes des murs du sérail, nous rétrogradâmes, toujours sous une forêt de platanes, de sycomores, et de cyprès les plus grands que j’aie jamais vus, et nous fîmes le tour des jardins extérieurs. Ils nous ramenèrent jusque sur les bords de la mer de Marmara, où sont deux ou trois palais magnifiques que les sultans habitent pendant l’été. Les appartements ouvrent sur le courant du canal, et sont sans cesse rafraîchis par la brise. Plus loin, des collines de gazon portent de petites mosquées, des kiosques, et des pièces d’eau entourées de parapets de marbre, et ombragées d’arbres gigantesques. Nous nous assîmes là, parmi les fleurs et les jets d’eau murmurante. Les hautes murailles du sérail derrière nous, et devant une pente de gazon finissant à la mer ; entre la mer et nous un rideau de cyprès et de platanes qui bordent le mur d’enceinte ; à travers ce rideau de cimes d’arbres, les flots de la mer de Marmara, les îles des Princes, les vaisseaux à la voile, dont les mâts glissaient d’un arbre à l’autre, Scutari rougi des rayons du soleil couchant : les cimes dorées du mont des Géants, et les cimes de neige des monts de Phrygie encadrant ce divin tableau.

Voilà donc l’intérieur de ce séjour mystérieux, le plus beau des séjours de la terre ; scène de tant de drames sanglants, où l’empire ottoman est né et a grandi, mais où il ne veut pas mourir ; car, depuis le massacre des janissaires, le sultan Mahmoud ne l’habite plus. Homme de mœurs douces et de volupté, ces taches de sang de son