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persanes que la guerre a ruinées. Son tombeau est placé à côté de celui de Mahomet II, avec cette orgueilleuse épitaphe : « En ce jour, sultan Sélim a passé au royaume éternnel, laissant l’empire du monde à Soliman. »

J’aperçois d’ici briller entre le dôme des mosquées la resplendissante coupole de la mosquée de Soliman, une des plus magnifiques de Constantinople. Il venait de perdre son premier fils, Mahomet, qu’il avait eu de la célèbre Roxelane. Cette mosquée rappelle un touchant témoignage de la douleur de ce prince. Pour honorer la mémoire de son enfant, il délivra une foule d’esclaves des deux sexes, et voulut associer ainsi des sympathies à sa douleur.

Bientôt, hélas ! les environs de cette même mosquée furent la scène d’un drame terrible. Soliman, excité contre un fils d’une autre femme, Mustapha, fait venir le muphti, et lui demande : « Quelle peine mérite Zaïr, esclave d’un marchand de cette ville, qui lui a confié, pendant un voyage, son épouse, ses enfants, ses trésors ? Zaïr a mis le trouble dans les affaires de son maître, il a tenté de séduire sa femme, il a dressé des embûches contre les enfants. Quelle peine mérite l’esclave Zaïr ?

» — L’esclave Zaïr mérite la mort, écrit le muphti. Dieu soit le meilleur ! »

Soliman, armé de cette réponse, mande Mustapha dans son camp. Il arrive accompagné de Zéangir, un fils de Roxelane, mais qui, loin de partager la haine de sa mère, portait à Mustapha, son frère, la plus tendre amitié. Arrivé