Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 7.djvu/361

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un sens, un sens profond et caché, mais un sens évident pour l’œil du philosophe. Ce sens, c’est précisément ce que vous vous plaignez d’avoir perdu, ce que vous niez dans le monde d’aujourd’hui ; c’est une idée commune ; c’est une conviction ; c’est une loi sociale ; c’est une vérité qui, entrée involontairement dans tous les esprits, et même, à leur insu, dans l’esprit des masses, travaille à se produire dans les faits avec la force d’une vérité divine, c’est-à-dire avec une force invincible. Cette foi, c’est la raison générale ; la parole est son organe, la presse est son apôtre : elle veut refaire à son image les civilisations, les sociétés, les législations imparfaites, ou altérées par les erreurs et les ignorances des âges ténébreux qu’elles ont traversés ; elle veut reposer en religion, — Dieu unique et parfait pour dogme, la morale éternelle pour symbole, l’adoration et la charité pour culte ; — en politique, l’humanité au-dessus des nationalités ; en législation, l’homme égal à l’homme, l’homme frère de l’homme ; la société comme un fraternel échange de services et de devoirs réciproques, régularisés et garantis par la loi ; en un mot, le christianisme législaté.

Elle le veut et elle le fait. Dites encore qu’il n’y a pas de croyances, qu’il n’y a pas de foi commune dans les hommes de ce temps-ci ! Depuis le christianisme, jamais si grande œuvre ne s’accomplit dans le monde avec de si faibles moyens. Une croix et une presse, voilà les deux instruments des deux plus grands mouvements civilisateurs du monde.