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Constantinople. Ce sont les deux seules cités qui ne soient pas arbitrairement jetées sur la carte d’un empire, mais invinciblement indiquées par la configuration des lieux. Tant que la terre portera des empires, Damas sera une grande ville, et Stamboul la capitale du monde ; à l’issue du désert, à l’embouchure des plaines de la Cœlésyrie et des vallées de Galilée, d’Idumée et du littoral des mers de Syrie, il fallait un repos enchanté aux caravanes de l’Inde : c’est Damas. Le commerce y a appelé l’industrie : Damas est semblable à Lyon, une vaste manufacture ; la population est de quatre cent mille âmes selon les uns, de deux cent mille selon les autres. Je l’ignore, et il est impossible de le savoir, on ne peut que le conjecturer : en Orient, pas de recensement exact ; il faut juger de l’œil. Au mouvement de la foule qui inonde les rues et les bazars, au nombre d’hommes armés qui s’élancent des maisons au signal des révolutions ou des émeutes, à l’étendue de terrain que les maisons occupent, je pencherais à croire que ce qui est renfermé dans ses murs peut s’élever de trois à quatre cent mille âmes. Mais si l’on ne limite pas arbitrairement la ville, si l’on compte au nombre des habitants tous ceux qui peuplent les immenses faubourgs et villages qui se confondent à l’œil avec les maisons et jardins de cette grande agglomération d’hommes, je croirais que le territoire de Damas en nourrit un million. J’y jette un dernier regard, avec des vœux intérieurs pour M. Baudin et les hommes excellents qui y ont protégé et charmé notre séjour ; et quelques pas de nos chevaux nous font perdre pour jamais les cimes de ses arbres et de ses minarets.

L’Arabe qui marche à côté de mon cheval me montre à