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traditions absurdes, leur côté populaire ; le côté philosophique du mahométisme est pur de ces grossiers mélanges : il n’est que résignation à la volonté de Dieu, et charité envers les hommes. J’ai vu un grand nombre de Turcs et d’Arabes profondément religieux, qui n’admettaient de leur religion que ce qu’elle a de raisonnable et d’humain. C’est un théisme pratique et contemplatif. On ne convertit guère de pareils hommes : il est plus facile de descendre du dogme merveilleux au dogme simple, que de remonter du dogme simple au dogme merveilleux.

L’intervention des jésuites avait un autre inconvénient parmi les Maronites. Par la nature même de leur institution, ils créent facilement des partis, des factions pieuses dans le clergé et dans la population ; ils inspirent, par l’ardeur même de leur zèle, ou l’enthousiasme ou la haine. Rien ne reste tiède autour d’eux : le haut clergé maronite, quoique simple et bon, ne pouvait voir d’un œil bienveillant l’établissement parmi eux d’un corps religieux qui aurait enlevé une partie des populations catholiques à leur domination spirituelle.

Les jésuites n’existent donc plus en Syrie. Ces dernières années seulement, il y est arrivé deux jeunes pères, l’un Français, l’autre Allemand, qu’un évêque maronite a fait venir pour professer dans l’école maronite qu’il fonde. J’ai connu ces deux excellents jeunes gens, tous les deux pleins de foi et consumés d’un zèle désintéressé. Ils ne négligeaient rien pour propager parmi les Druzes, leurs voisins, quelques idées de christianisme ; mais l’effet de leurs démarches se bornait à baptiser en secret, à l’insu des parents, de petits