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affligent et attristent l’œil, ils font tache sur toute cette vie bruyante et agitée ; — mais dans la solitude, aux bords de la mer, sur un cap abandonné, sur une grève sauvage, trois pierres, jaunies par les siècles et brisées par la foudre, font réfléchir, penser, rêver ou pleurer.

La solitude et la mort, la solitude et le passé, qui est la mort des choses, s’allient nécessairement dans la pensée humaine. Leur accord est une mystérieuse harmonie. J’aime mieux le promontoire nu de Carthage, le cap mélancolique de Sunium, la plage nue et infestée de Pæstum, pour y placer les scènes des temps écoulés, que les temples, les arcs, les colisées de Rome morte, foulés aux pieds dans Rome vivante, avec l’indifférence de l’habitude ou la profanation de l’oubli.




20 juillet 1832.


À dix heures le vent s’adoucit ; nous pouvons monter sur le pont, et, filant sept nœuds par heure, nous nous trouvons bientôt à la hauteur de l’île isolée de Pantelleria, ancienne île de Calypso, délicieuse encore par sa végétation africaine et la fraîcheur de ses vallées et de ses eaux. C’est là que les empereurs exilèrent successivement les condamnés politiques.

Elle ne nous apparaît que comme un cône noir sortant de