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bannis de la ville pendant de nombreuses années. Jérusalem, à l’exception de ses piscines et des tombeaux des rois, ne conserve aucun monument d’aucune de ces grandes époques : quelques sites seulement sont reconnaissables, comme le site du temple, dessiné par ses terrasses, et portant aujourd’hui l’immense et belle mosquée d’Omar-el-Sakara ; le mont de Sion, occupé par le couvent des Arméniens et le tombeau de David ; mais ce n’est même que l’histoire à la main et avec l’œil du doute que la plupart de ces sites peuvent être assignés avec une certaine précision. Hormis les murs de terrasses sur la vallée de Josaphat, aucune pierre ne porte sa date dans sa forme et dans sa couleur ; tout est en poudre, ou tout est moderne. L’esprit erre incertain sur l’horizon de la ville, sans savoir où se poser ; mais la ville tout entière, dessinée par la colline circonscrite qui la porte, par les différentes vallées qui l’enceignent, et surtout par la profonde vallée du Cédron, est un monument auquel l’œil ne peut se tromper : c’est bien là que Sion était assise ; site bizarre et malheureux pour la capitale d’un grand peuple : c’est plutôt la forteresse naturelle d’un petit peuple chassé de la terre, et se réfugiant avec son Dieu et son temple sur un sol que nul n’a intérêt à lui disputer, sur des rochers qu’aucunes routes ne peuvent rendre accessibles, dans des vallées sans eau, dans un climat rude et stérile, n’ayant pour horizon que les montagnes calcinées par le feu intérieur des volcans, les montagnes d’Arabie et de Jéricho, et qu’une mer infecte, sans rivage et sans navigation, la mer Morte !

Voilà la Judée, voilà le site de ce peuple dont le destin est d’être proscrit à toutes les époques de son histoire, et à