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vers de la montagne, une petite source et l’ombre de quelques oliviers : nous y fîmes halte. Le site était sublime : nous dominions la noire et profonde vallée de Térébinthe, où David, avec sa fronde, tua le géant philistin. La position des deux armées est tellement décrite dans la circonscription de la vallée et dans la pente et la disposition du terrain, qu’il est impossible à l’œil d’hésiter. Le torrent à sec sur les bords duquel David ramassa la pierre traçait sa ligne blanchâtre au milieu de l’étroite vallée, et marquait, comme dans le récit de la Bible, la séparation des deux camps. Je n’avais là ni Bible ni voyage à la main, personne pour me donner la clef des lieux et le nom antique des vallées et des montagnes ; mais mon imagination d’enfant s’était si vivement et avec tant de vérité représenté la forme des lieux, l’aspect physique des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, d’après les récits et les gravures des livres saints, que je reconnus tout de suite la vallée de Térébinthe et le champ de bataille de Saül. Quand nous fûmes au couvent, je n’eus qu’à me faire confirmer par les Pères l’exactitude de mes prévisions. Mes compagnons de voyage ne pouvaient le croire.

La même chose m’était arrivée à Séphora, au milieu des collines de la Galilée. J’avais désigné du doigt et nommé par son nom une colline surmontée d’un château ruiné, comme le lieu probable de la naissance de la Vierge. Le lendemain, la même chose encore m’arriva pour la demeure des Machabées à Modin : en passant au pied d’une montagne aride surmontée de quelques débris d’aqueduc, je reconnus le tombeau des derniers grands citoyens du peuple juif, et je disais vrai sans le savoir. L’imagination