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ment assise au sommet de la ville, et dominant les trois horizons de la mer, de la côte de Gaza et d’Ascalon vers l’Égypte, et du rivage de Syrie du côté du nord. Les chambres sont entourées et surmontées de terrasses découvertes où joue la brise de mer, et d’où l’on découvre, à dix lieues en mer, la moindre voile qui traverse le golfe de Damiette. Ces chambres n’ont pas de fenêtres, le climat les rend superflues : l’air a toujours la tiédeur de nos plus belles journées de printemps ; un mauvais abat-jour mal joint est le seul rempart que l’on interpose entre le soleil et soi. On partage avec les oiseaux du ciel ces demeures que l’homme s’est préparées : et dans le salon de M. Damiani, sur les étagères de bois qui règnent autour de l’appartement, des centaines de petites hirondelles au collier rouge étaient posées à côté des porcelaines de la Chine, des tasses d’argent et des tuyaux de pipe qui décorent les corniches. Elles voltigeaient tout le jour au-dessus de nos têtes, et venaient, pendant le souper, se suspendre jusque sur les branches de cuivre de la lampe qui éclairait le repas.

La famille se compose de M. Damiani père, figure indécise entre le patriarche et le marchand italien, mais où le patriarche prédomine ; de Madame Damiani la mère, belle femme arabe, mère de douze enfants, mais conservant encore dans ses formes et dans son teint l’éclat et la fraîcheur de la beauté turque ; de plusieurs jeunes filles presque toutes d’une beauté remarquable, et de trois fils, dont nous connaissons déjà l’aîné. Les deux autres furent pour nous de la même prévenance et de la même utilité. Les femmes ne montaient pas dans les appartements. Elles ne parurent qu’une fois en habits de cérémonie et couvertes de leurs plus