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23 octobre 1832.


Au lever du soleil, nous avons quitté, frais et dispos, le couvent du mont Carmel et ses deux excellents religieux, et nous nous sommes acheminés par des sentiers escarpés qui descendent du cap à la mer. Là, nous sommes entrés dans le désert ; il règne entre la mer de la Syrie, dont les côtes ici sont en général plates, sablonneuses et découpées en petits golfes, et les montagnes qui font suite au mont Carmel. Ces montagnes s’abaissent, par degrés insensibles, en se rapprochant de la Galilée ; elles sont noires et nues ; les rochers percent souvent l’enveloppe de terre et d’arbustes qui leur reste ; leur aspect est sombre et morne ; elles n’ont que leur vêtement de lumière éblouissante et la majesté idéale du passé qui les entoure ; de temps en temps la chaîne, qu’elles continuent pendant environ dix lieues, est brisée, et quelque vallée peu profonde s’entr’ouvre au regard ; au fond ou sur les flancs d’une de ces vallées, nous voyons distinctement les restes d’un château fort, et un grand village arabe qui s’étend sous les murs du château ; la fumée des maisons s’élève et serpente le long des flancs du Carmel, et de longues files de chameaux, de chèvres noires et de vaches rouges, se prolongent du village dans la plaine que nous traversons ; quelques Arabes à cheval, armés de lances et vêtus seulement de leur couverture de laine blanche, les jambes et les bras nus, marchent en tête et en flanc de ces