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sages. Combien de sites n’ai-je pas choisis là, dans ma pensée, pour y élever une maison, une forteresse agricole, et y fonder une colonie avec quelques amis d’Europe et quelques centaines de ces jeunes hommes déshérités de tout avenir dans nos contrées trop pleines ! La beauté des lieux, la beauté du ciel, la fertilité prodigieuse du sol, la variété des produits équinoxiaux qu’on peut y demander à la terre ; la facilité de s’y procurer des travailleurs à bas prix ; le voisinage de deux plaines immenses, fécondes, arrosées et incultes ; la proximité de la mer pour l’exportation des denrées ; la sécurité qu’on obtiendrait aisément contre les Arabes du Jourdain, en élevant de légères fortifications à l’issue des gorges de ces collines : tout m’a fait choisir cette partie de la Syrie pour l’entreprise agricole et civilisatrice que j’ai arrêtée depuis.




Même date, le soir.


Nous avons été surpris par un orage au milieu du jour. J’en ai peu vu de si terribles. Les nuages se sont élevés perpendiculairement, comme des tours, au-dessus du mont Carmel ; bientôt ils ont couvert toute la longue crête de cette chaîne de montagnes ; la montagne, tout à l’heure si sereine et si éclatante, a été plongée peu à peu dans des vagues roulantes de ténèbres fendues çà et là par des traînées