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dition d’un lieu cher à son souvenir, que ne le fit la piété des fidèles et des martyrs. On peut s’en rapporter, quant à l’exactitude des principaux sites de la rédemption, à la ferveur d’un culte naissant, et à la vigilance d’un culte immortel. Nous tombâmes à genoux sur ces pierres, sous cette voûte, témoins du plus incompréhensible mystère de la charité divine pour l’homme, et nous priâmes. — L’enthousiasme de la prière est un mystère aussi entre l’homme et Dieu : comme la pudeur, il jette un voile sur la pensée, et dérobe aux hommes ce qui n’est que pour le ciel. Nous visitâmes aussi le couvent vaste et commode, édifice semblable à tous les couvents de France ou d’Italie, où les Pères Latins exercent aussi librement, et avec autant de sécurité et de publicité, les cérémonies de leur culte, qu’ils pourraient le faire dans une rue de Rome, capitale du christianisme. On a, à cet égard, beaucoup calomnié les musulmans. La tolérance religieuse, je dirai plus, le respect religieux, sont profondément empreints dans leurs mœurs. Ils sont si religieux eux-mêmes, et considèrent d’un œil si jaloux la liberté de leurs exercices religieux, que la religion des autres hommes est la dernière chose à laquelle ils se permettraient d’attenter. Ils ont quelquefois une sorte d’horreur pour une religion dont le symbole offense la leur, mais ils n’ont de mépris et de haine que pour l’homme qui ne prie le Tout-Puissant dans aucune langue : ces hommes, ils ne les comprennent pas, tant la pensée évidente de Dieu est toujours présente à leur esprit, et préoccupe constamment leur âme. — Quinze ou vingt Pères espagnols et italiens vivent dans ce couvent, occupés à chanter les louanges de l’Enfant-Dieu et les gloires de sa mère, dans le temple même où ils vécurent pauvres et ignorés. L’un d’eux, qu’on appelle le curé