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ronite, pour donner des règlements et des modèles aux maîtres arabes ; ils vivent là dans une complète solitude, dans la pauvreté, et dans une sainteté exemplaire. (Je les ai connus plus tard.) L’un apprend l’arabe, et cherche inutilement à convertir quelques Druzes des villages voisins : c’est un homme de beaucoup d’esprit et de lumières ; l’autre s’occupe de médecine, et parcourt le pays en distribuant des médicaments gratuits : tous deux sont aimés et respectés par les Druzes et même par les Métualis. Mais ils ne peuvent espérer aucun fruit de leur séjour en Syrie : le clergé maronite est très-attaché à l’Église romaine ; cependant ce clergé a ses traditions, son indépendance, sa discipline à lui, qu’il ne laisserait pas envahir par l’esprit des jésuites ; il est la véritable autorité spirituelle, le gouverneur des esprits dans tout le Liban ; il aurait bien vite des rivaux dans des corporations européennes agissantes et remuantes, et cette rivalité l’inquiéterait avec raison.

Après nous être reposés une demi-heure dans ce site enchanté, nous remontâmes à cheval, et nous commençâmes à gravir la côte escarpée qui se dressait devant nous. Le sentier devenait de plus en plus rude, en s’élevant sur la dernière chaîne du Liban qui nous séparait des côtes de Syrie. Mais, à mesure que nous nous élevions, l’aspect du bassin immense que nous laissions à notre droite devenait plus imposant et plus vaste.

Le fleuve, que nous avions quitté à la halte, serpentait au milieu de cette plaine légèrement ondulée de collines, et quelquefois s’étendait en flaques d’eau bleue et brillante comme les lacs de Suisse. Les collines noires, couronnées à