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des mosquées et une église ; mais depuis quelques années sa religion de famille, la religion du cœur, est le catholicisme. Sa politique est telle, et la terreur de son nom si bien établie, que sa foi chrétienne n’inspire ni défiance ni répugnance aux Arabes musulmans, aux Druzes et aux Métualis qui vivent sous son empire. Il fait justice à tous, et tous le respectent également.

Le soir après souper, l’émir nous envoya quelques-uns de ses musiciens et de ses chanteurs, qui improvisèrent des vers arabes en notre honneur. Il a parmi ses serviteurs des Arabes uniquement consacrés à ces sortes de cérémonies. Ils sont exactement ce qu’étaient les troubadours dans les châteaux du moyen âge, ou en Écosse les poëtes populaires. Debout derrière le coussin de l’émir ou de ses fils pendant qu’ils prennent leur repas, ils chantent des vers à la louange des maîtres qu’ils servent, ou des convives que l’émir veut honorer. Nous nous fîmes traduire par M. Bertrand quelques-uns de ces toasts poétiques : ils étaient en général très-insignifiants, ou d’une telle recherche d’idées, qu’il serait impossible de les rendre avec des idées et des images appropriées à nos langues d’Europe.

Voici la seule pensée un peu claire que je trouve notée sur mon album :


« Votre vaisseau avait des ailes, mais le coursier de l’Arabe a des ailes aussi. Ses naseaux, quand il vole sur nos montagnes, font le bruit du vent dans les voiles du navire. Le mouvement de son galop rapide est comme le