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blanc, poli comme celui des plus belles femmes d’Angleterre ou de Suisse ; mais la ligne régulière, droite et large du nez donne plus de majesté et de noblesse antique à la physionomie. — Les sculpteurs grecs eussent été bien plus parfaits encore, s’ils eussent pris leurs modèles de figures de femmes en Asie ! — Et puis il est si doux pour un Européen accoutumé aux traits fatigués, à la physionomie travaillée et contractée des femmes d’Europe, et surtout des femmes de salon, de voir enfin des figures aussi simples, aussi pures, aussi calmes que le marbre qui sort de la carrière ; des figures qui n’ont qu’une seule expression, le repos et la tendresse, et dans lesquelles l’œil lit aussi vite et aussi facilement que dans les caractères majuscules d’une magnifique édition de luxe !

La société et la civilisation sont évidemment ennemies de la beauté physique. Elles multiplient trop les impressions et les sentiments ; et comme la physionomie en reçoit et en garde involontairement l’empreinte, elle se complique et s’altère elle-même ; elle a quelque chose de confus et d’incertain qui détruit sa simplicité et son charme ; c’est une langue qui a trop de mots et qui ne s’entend plus, parce qu’elle est trop riche.