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bragent le temple de Thésée, le Pnyx, l’Aréopage et la colline des Nymphes, nous découvrions une plus vaste étendue de la ville moderne qui se déployait sur notre gauche, semblable en tout à ce que nous avions vu ailleurs. — Assemblage confus, vaste, morne, désordonné, de huttes écroulées, de pans de murs encore debout, de toits enfoncés, de jardins et de cours ravagés, de monceaux de pierres entassées, barrant les chemins et roulant sous les pieds ; tout cela couleur de ruines récentes, de ce gris terne, flasque, décoloré, qui n’a pas même pour l’œil la sainteté du temps écoulé, ni la grâce des ruines. — Nulle végétation, excepté trois ou quatre palmiers semblables à des minarets turcs restés debout sur la ville détruite ; çà et là quelques maisons aux formes vulgaires et modernes, récemment relevées par quelques Européens ou quelques Grecs de Constantinople. — Maisons de nos villages de France ou d’Angleterre, toits élevés sans grâce, fenêtres nombreuses et étroites ; — absence de terrasse, de lignes architecturales, de décorations ; — auberges pour la vie, bâties en attendant une destruction nouvelle ; mais rien de ces palais qu’un peuple civilisé élève avec confiance pour lui et les générations à naître. — Au milieu de tout ce chaos, mais rares, quelques pans de stade, quelques colonnes noirâtres de l’arche d’Adrien ou de Lazora, le dôme de la tour des Vents ou de la lanterne de Diogène, appelant l’œil et ne l’arrêtant pas. — Devant nous grandissait et se détachait du tertre gris où il est placé, le temple de Thésée, isolé, découvert de toutes parts, debout tout entier sur son piédestal de rochers ; — ce temple, après le Parthénon, le plus beau, selon la science, que la Grèce ait élevé à ses dieux ou à ses héros.