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des banquettes élevées autour d’une aire de sable : ils parlent de leur place.

Nous nous asseyons, pour les voir arriver, sur un monceau de pierres à la porte de la salle. — Ils viennent successivement à cheval, accompagnés chacun d’une escorte plus ou moins nombreuse, suivant l’importance du chef. Le député descend de cheval, et ses palikars, chargés d’armes superbes, vont se grouper à quelque distance dans la petite plaine qui entoure la salle. Cette plaine présente l’image d’un campement ou d’une caravane.

L’attitude des députés est martiale et fière ; ils parlent sans confusion, sans interruption, d’un ton de voix ému, mais ferme, mesuré et harmonieux. Ce ne sont plus ces figures féroces qui repoussent l’œil dans les rues de Nauplie ; ce sont des chefs d’un peuple héroïque qui tiennent encore à la main le fusil ou le sabre avec lequel ils viennent de combattre pour sa délivrance, et qui délibèrent ensemble sur les moyens d’assurer le triomphe de leur liberté. Leur parlement est un conseil de guerre.

On ne peut rien imaginer de plus simple et à la fois de plus imposant que le spectacle de cette nation armée, délibérant ainsi sur les ruines de sa patrie, sous une voûte de planches élevée en plein champ, tandis que les soldats polissent leurs armes à la porte de ce sénat, et que les chevaux hennissent, impatients de reprendre le sentier des montagnes. Il y a des têtes admirables de beauté, d’intelligence et d’héroïsme parmi ces chefs : ce sont les montagnards. Les Grecs marchands des îles se reconnaissent aisément à