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FIOR D’ALIZA.

je souffris dans cette minute ! Un silence de stupeur empêchait de respirer toute la foule.

CCLXI

Un cri partit en ce moment du côté de l’escalier qui menait au rempart. Un homme s’élança en fendant le rang des soldats. Arrêtez ! arrêtez ! c’est moi ! et il tomba inanimé à mes pieds ; le ciel s’obscurcit, la tête me tourna et je me sentis évanouir dans les bras de mon époux. Nous mourûmes tous deux sans nous sentir mourir ! C’était Hyeronimo qui, entendant les cloches du supplice, et en ne me voyant pas arriver sur ses pas sous l’arche du pont, s’était défié enfin de quelque chose, était rentré dans Lucques, avait volé à la porte de la prison, et, apprenant là par le piccinino que les sbires me menaient mourir à sa place, avait volé comme le vent sur mes traces, et venait réclamer à grands cris son droit de mort, s’il était encore temps.

Depuis ce moment, je ne vis plus rien, j’étais dans un autre monde. Quand je m’éveillai, j’étais dans un vrai paradis, au milieu d’un appartement tout d’or, de peintures, de glaces et de statues, qui toutes semblaient me regarder, entourée des belles suivantes de la duchesse, qui me faisaient respirer un flacon d’odeur délicieuse, et