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FIOR D’ALIZA.

conduire lui-même le forgeron au cachot, et où les coups de marteau qui descellaient les fers du prisonnier retentirent dans le cloître et jusqu’à ma fenêtre. Je tombai sur mes deux genoux devant la lucarne pour remercier Dieu de ce qui était pourtant un signe de mort, et je me dis en moi-même : Voilà qu’on lui rend ses membres, à toi maintenant de lui rendre la liberté et la vie !

CCXXII

Quand tout fut rentré dans le silence ordinaire du cloître, et que le bargello en fut sorti avec le forgeron et les hommes noirs de la justice, j’y entrai sans bruit avec la provende et les cruches d’eau des prisonniers ; je ne fus pas lente, croyez-moi, à distribuer a chacun sa portion, à ouvrir et à refermer leurs grilles ; les pieds me brûlaient de courir au cachot de votre enfant. Il se tenait encore tout au fond, debout sur sa paille, de peur de se trahir en se précipitant trop vite vers moi ; mais, quand j’eus ouvert sa grille d’une main toute tremblante, il bondit comme un bélier du fond de l’ombre, il me prit dans ses bras et m’étouffa contre son cœur, où je me sentais mourir et où je restai longtemps sans que lui ni moi nous puissions proférer une seule parole ; lui baisait mes cheveux, moi ses mains, tels que nous nous serrions, vous et moi, ma tante,