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CHAPITRE VI.

ma chambre ; je l’empêcherai seulement une heure ou deux de s’envoler, je lui donnerai des graines douces et du maïs sucré sur le bord de ma fenêtre, et je la lâcherai ensuite pour qu’elle rejoigne ses compagnes dans la cour ; tu la reconnaîtras au bout de fil bleu que j’aurai noué à ses jambes roses, et c’est celle-là que tu apprivoiseras de préférence en faisant peur aux autres ; au bout de deux ou trois jours, tu verras qu’elle viendra à tout moment te visiter et qu’à tout moment aussi elle remontera de la lucarne a ma tour, pour redescendre encore de ma tour a ton cachot.

J’éffillerai ma veste et ma ceinture, et, quand le fil sera blanc, rouge ou bleu, cela voudra dire : Bonne nouvelle ! et, quand il sera brun ou noir, cela voudra dire : Prenons garde, tremblons et prions ! Toi, tu lui attacheras un fil à la patte pour me dire : Je pense a toi, je t’ai comprise, je suis content ou je suis en peine. Nous saurons ainsi, a toute heure, grâce à ce messager, ce qui se remue dans nos cœurs ou dans nos sorts, sans que la présence du bargello dans la cour puisse empêcher nos confidences.

CCIV

Quand le bargello rentra du tribunal et qu’il entendit la zampogne dans la cour, il vint a moi.

— C’est bien, me dit-il, mon garçon, j’aime que ma