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CHAPITRE III.

que de vous laisser porter la hache sur son écorce ; si quelque chose est à nous sur la terre, c’est lui ! Oserez-vous nier que le papier des juges me réserve en jouissance tout le bois, toutes les feuilles, toute l’ombre, tous les fruits de ce côté ?

— Non, répondit l’homme de loi, je ne le conteste pas ; mais, de votre côté, oserez-vous nier que la propriété de l’arbre lui-même est au capitaine des sbires, et que, quand il aura fait de sa propriété ce qu’il a le droit d’en faire, votre droit tout conditionnel, a vous, ne subsistera plus ; car, puisqu’il est le propriétaire, il a le droit d’abattre l’arbre, et, le tronc une fois abattu, que deviennent les branches ?

CIV

— J’avoue, monsieur, que je n’y avais jamais pensé et que je restai muet à cette réponse ; mais si ma parole ne pouvait repousser sa raison, toute ma vie en moi protestait contre cette iniquité de l’homme de loi. Magdalena et Fior d’Aliza alors, qui n’avaient jamais plus que moi pensé seulement qu’on pouvait nous abattre le châtaignier sur la tête, ne cherchaient pas de raisons mais des supplications contre cet homicide.

Tombées à genoux aux pieds de l’homme noir, elles levaient leurs mains vers ses mains, le conjurant de nous