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CHAPITRE IV.

que nous sommes, si cela devait arriver jamais, que deviendrions-nous ?

XCVII

À ces mots, nous entendîmes monter-par le sentier de rochers polis, du côté de Lucques, le padre Hilario ; il suait et il soufflait comme une mule trop chargée qui a besoin qu’on le soulage, au sommet de la montée, de sa charge.

Le padre Hilario était le frère commissionnaire du couvent des Camaldules de San Stefano ; c’était un beau vieillard grande barbe blanche ; une couronne de cheveux fins comme des fils de la Vierge, autour de sa tonsure, le rendait tout à fait semblable aux statues de san Francisco d’Assise, sur les murs du chœur des Franciscains de Lucques ; il était si vieux, qu’il nous avait tous vus naître ; mais il n’était point cassé pour son âge, il était seulement un peu voûté par l’habitude de porter les besaces gonflées des cruches d’huile et des outres de vin du couvent, et de monter a pas mesurés les sentiers à pic de la montagne. Notre cabane était à peu près à moitié chemin de la plaine aux Camaldules ; il avait l’habitude, depuis plus de quarante ans, de s’y arrêter un bon moment pour respirer et pour converser un instant avec les Zampognari ; il’avait caressé les enfants, marié les jeunes filles, consolé et vu