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FIOR D’ALIZA.

vous allez voir que ce n’était pas par dévotion, au pèlerinage des Camaldules. Le malheur voulut que, dans ce moment-là, la petite sortait de laver les agneaux dans le bassin d’eau sombre, où vous voyez reluire le ciel bleu au milieu des joncs fleuris, au fond du pré, sous les lauriers ; elle s’essuyait les pieds, debout, avec une brassée de feuilles de noisetier, avant de remonter vers la cabane ; sa chemise, toute mouillée aux bras et collant sur ses membres, n’était retenue que par la ceinture de son court jupon de drap rouge, qui ne lui tombait qu’à mi-jambes ; ses épaules nues, partageant en deux ses tresses déjà longues et épaisses de cheveux, qui reluisaient comme de l’or au soleil du matin ; elle tournait ça et la son gracieux visage et riait à son image tremblante dans l’eau, à côté des fleurs, ne sachant pas seulement qu’un oiseau des bois la regardait.

LXXI

Les pèlerins, surpris, s’arrêtèrent à sa vue et firent silence pour ne pas l’effaroucher, comme quand un chasseur voit un chevreuil confiant, seul au bord du torrent, à travers les feuilles. Ils se faisaient entre eux des gestes d’admiration en regardant la belle enfant.

— En voilà une de Madone ! s’écria un des plus jeunes de la bande.