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CHAPITRE III.

mort, dans le petit bois de lauriers, pour cuire les châtaignes dans la marmite de terre, et Hyeronimo commençait aussi à remuer la terre pour y semer le maïs et le millet. Quant aux chèvres, aux moutons et à l’áne, ils se gardaient eux-mêmes dans la bruyère, et quand ils tardaient à se rapprocher, le soir, le chien que j’envoyais dans la montagne me comprenait ; il les ramenait tout seul à la cabane ; ce bon chien était le père de celui que vous voyez couché aux pieds de son maître ; il l’a si bien instruit qu’il nous sert comme son père ; c’est un serviteur sans gages, pour l’amour de Dieu.

LXVIII

On pouvait encore mener doucement sa pauvre vie et bénir Dieu et la Madone dans cette condition ; je devenais vieille, Antonio était infirme, mais patient ; le temps coulait, comme l’eau de la source, entraînant sans bruit les feuilles mortes comme les années comptées dans sa course ; les enfants s’aimaient, ils étaient gais ; un frère quêteur du couvent de San Stefano leur avait appris, en passant, leur religion ; ils étaient aussi obéissants à moi qu’au vieil Antonio, et nous confondaient tellement dans leur tendresse, que la fille ne savait pas si elle était ma fille ou celle d’Antonio, et que le garçon ne savait pas dire s’il était mon fils ou celui du vieillard. C’étaient comme des enfants jumeaux,