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jocelyn.

Et les pigeons enfuis de leurs nids, effrayés,
Par Laurence nommés revenaient d’un coup d’aile
Becqueter son épaule et planer autour d’elle.
Et puis je vis venir d’en haut, monter d’en bas,
Hommes, femmes, enfants, que je ne connus pas,
À ces noces du ciel foule que Dieu convie,
Venant pour retracer et bénir une vie.
Jocelyn, lui du moins, tous les reconnaissait,
Car par son nom mortel chacun le bénissait.
Et deux anges de Dieu sur l’herbe descendirent ;
Sur le couple béni leurs ailes s’étendirent,
Et ces ailes formaient comme un grand dôme bleu
Pour ombrager leurs fronts d’un invisible feu ;
Et j’entendis les voix d’un million de génies
Se répandre sur l’onde en vagues d’harmonies ;
Et pendant qu’ils chantaient, les anges du Seigneur
Aux doigts des deux amants rougissant de bonheur
Passaient le double anneau des noces éternelles,
Et sur leurs fronts baissés, ouvrant un peu leurs ailes,
Laissaient percer du ciel un rayon de l’amour :
Et mes yeux, foudroyés de ce céleste jour,
Virent les deux amants ne former qu’un seul être,
Où l’un ne pouvait plus de l’autre se connaître,
Et dans un lumineux évanouissement
Fondre comme une étoile au jour du firmament.
Et comme, pour mieux voir, je détournais la tête,
Tout le lac frissonna du vol de la tempête,
Et roula dans ses bruits, avec solennité,
« Laurence ! Jocelyn ! amour ! éternité ! »