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septième époque.

Ô sol de mon berceau, que ne puis-je te rendre
Ce corps pétri de toi ! que ne puis-je répandre
Toute ma vie en eau de mes yeux épuisés,
Restituer ces pleurs où je les ai puisés,
Comme le filet d’eau qui, lassé de sa course,
Tarit et rentre en terre à deux pas de sa source !

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Mère, sous ton regard de tendresse interdit,
Non, tu ne savais pas, je ne t’ai jamais dit,
Je ne me suis jamais dit peut-être à moi-même
(C’est quand on a perdu qu’on sait comment on aime),
Non, je ne savais pas, je ne dirai jamais
De quelle âme de fils, ô mère, je t’aimais !

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L’aimer ! Mais pour l’aimer étais-je un autre qu’elle ?
N’étais-je pas nourri du suc de sa mamelle,
Éclos de son amour, réchauffé dans son flanc,
La moelle de ses os, le plus pur de son sang ?
L’air qu’elle respirait dans sa chaste poitrine
Ne fut-il pas neuf mois celui de ma narine ?
De son cœur près du mien le moindre battement
Ne m’inspirait-il pas le même sentiment ?
Mon corps n’était-il pas tout son corps ? et mon âme
Un foyer emprunté qu’allume une autre flamme ?